mercredi 19 juin 2013

SUD - ArielRemixed



Statue dans un musée rempli de courants d’air. Ma nudité menace ta sécurité. Tu t’écartes comme des murs ébahis. Toute la nuit son souffle de papillon vibre. J’écoute. La main laisse une trace épidermique de son violent retrait. Tout le matin depuis ce matin sombre. Fleur ignorée, j’organise des listes. Mes os renferment le silence. Les cris de mes propres enfants font au loin mon cœur fondre. Garantie à vie. Ça travaille ça fait à manger. Et ça parle. Vous avez un trou, c’est une ventouse. Vous avez un œil, c’est une image. C’est intenable tous les aujourd’hui. Je suis scellée. Je brûle et me consume. De la cendre saupoudrée sur le lac. La nuit, ça claque des ailes. Et part, toutes griffes dehors, chercher de quoi aimer. Avec mes cheveux d’algues je sors et dévore les hommes. Dévore les hommes comme l’air. Un petit restant de vie. Un dernier feu. Et puis bientôt plus rien. Aussi faut-il s’embraser séance tenante. Pupille stupide et dilatée. Comme la lumière se pose sur ces murs, ce lit, ces mains, je ne suis personne. Les explosions ne me concernent pas. J’ai abandonné mon nom. Je n’en ai jamais eu. Perdue, mes bagages m’encombrent. Sur la photo de famille, les sourires s’accrochent, petites griffes mesquines. Moi dans l’angle mort. J’ai laissé les choses filer. Ainsi amarrée. L’eau monte. Me voilà nonne maintenant. Carmélite à usage privé. Je reste couchée les paumes offertes, complètement vide. Personne ne me prête attention ou l’on me dévisage. Ombre de papier découpé. Origami ingénieux : on dirait qu’il flotte alors qu’il pèse. Je n’ai plus de visage. Les gens je les déçois. Epave rouille de rouge d’un moteur. On dirait que les murs s’animent eux aussi. Malaise saboteur. Malaise kamikaze. La pulpe du cœur affronte sa petite meule de silence. Poupée souillon. Brisée brisée. Jusqu’à ce que ta tête soit une pierre. Je lève une main de barbelés rouges. Je suis cette demeure hantée par un cri. Silence s’enroule. Vampirisée par cette chose obscure qui sommeille en moi. Tout le jour je subis son manège, je souris par-dessus l’insistance de la voix. Il faut payer pour regarder mes cicatrices. Il faut payer - et très cher ! - pour avoir un mot, un geste, un peu de sang. Voilà Herr Ennemi. Au marché mon cœur rouge fleurit incroyablement mon manteau. Que suis-je si ces bouches et moi pas. Silence s’enroule. Que suis-je ? Une eau verte ouvre un œil malade de tout ce qu’il a englouti. Virulence immobile. Au balcon les choses brillent. Les choses. Voici le flanc d’un homme : les côtes rouges. On se croirait devenu propriétaire d’un saint. La date toute nue grave dans l’argent ses chiffres qui disent : au compteur de l’alliance une année de plus. S’avance une nouvelle avec son ciel de sourires réservés pour plus tard. La fleur des fiançailles a épuisé sa fraîcheur depuis longtemps. Je gis desséchée entre les draps. L’herboriste est toxique et négligent. Comme le meurtrier, il n’a pas de visage. C’est la faille isolée. L’erreur lente qui tue, qui tue. Derrière la vitre, le monde remue. Caresse papier de verre. Tout ce qui vient du dehors me fissure. Pas de stase. Quelqu’un quelque part est foutu. Sans reflet, contrairement au cygne, l’homme-araignée m’a capturée. Il voudrait me faire dormir dans son réduit minable. Me faire passer un concours pour turbiner à La Poste. Conserver tous mes bouts. Sauve-toi relique ! Mes doublures s’accrochent à ma coque, pressantes comme des sœurs, stigmates en plein centre. Si tu savais combien de jours ces voiles m’ont tuée. Pour toi ils sont transparences, limpidité de l’air. Pas même insignifiance arachnéenne réclamant le cagneux du balai. Bouteille dans quoi je vis. Assassinée tous les jours en pleine lumière sous le sceau du licite. Tu n’as qu’une jambe et je boite. Je regarde ma robe de mariée qui me raconte pourquoi. Je suis seule avec moi, trempée jusqu’à la taille, mourant d’envie de dire quelque chose de définitif. A la rigueur avoir quelque chose en tête comme l’Amérique. Mais haine à ras bord. Haine à ras bord. Triple du morne. Triple du rien. Triple bouchée de cendre. Epluchures, couches, acétylène. Triple jupon de putain. Sous le châle maillé, le corps dépouillé de ses velours, si peu royale et même scandaleuse. Qu’importe de récurer l’évier trois fois quand je porte le même T-shirt sale depuis sept jours. J’essuie les assiettes avec les cheveux longs des servantes de la Longue Dame Disparue. Dehors, le monde a lieu. Et puis, soudain : paupière de lézard, la nuit se referme d’un coup sec, les doigts piégés dans un tumulte de clefs. Tout est en rang de tes ordres. Jusqu’à ma chair hérissée. Sourire limaille de fer. Je me maquille en clown parce que ça me fait moins peur.
Il n’y a pas de terminus. Juste des valises d’où se déplie la même identité comme un costume brillant d’usure aux poches autrefois pleines de vœux. Il n’y a pas de terminus. On ne va nulle part et on ne descend pas. Il n’y pas de terminus.