mardi 1 juillet 2008

SUD - Pluie

Il flotte comme en Normandie. Le ciel est gris et noir de façon à ne laisser subsister absolument aucun doute sur ce qui adviendra d’ici le soir. Les voisins - lui maigre, elle l’inverse, le corps qui essaie de s’enfuir par-dessus l’élastique qui retient le tissus à la taille et aux cuisses, énorme en short et T shirt siglés, les cheveux gras ramenés en un brouillon de queue de cheval, un regard de cocker - fument sur le balcon en face de ma fenêtre. Depuis que les gars qui s’occupent de l’entretien de la rivière ont tranché net le tronc de l’énorme figuier qui nous servait de rideau aux uns et aux autres on peut se mater à loisir. Parfois la petite - elle ne doit pas avoir 2 ans - déboule comme un petit bolide manga dans les grosses jambes de sa mère mais elle est stoppée net par la grille du micro balcon. On dirait un petit animal en cage. Ils semblent sortis tout droit d’un de ces terrains vagues où les parents des loosers vivent dans des mobiles homes. A Detroit par exemple. Oui à Detroit. A chaque fois que je les aperçois, je pense aux parents d’Iggy Pop.


J’aime bien ce temps. Peut être parce que c’est vraiment rare ici. J’ai l’impression de me rapprocher de toi.


J’écoute l’album de Miss Scarlett en boucle.

Hier c’était la fête des mères. Tom Waits revu par Tim Burton. Ça me fait marrer. En fait une fois que t’y es c’est un peu tous les jours ta fête. Les accès de schizophrénie sont ils des fêtes ? Je me regarde je suis je regarde la scène c’est pourtant moi qui joue. La fée clochette et le gars qui a écrit Diamond dogs. Est-ce que ma mère a ressenti ça aussi quand elle recevait son collier de nouilles quand elle m’obligeait à finir mon assiette à ranger ma chambre surtout le robinet dans la salle de bain et le gros son de Scream like a baby. Il avait commencé par oublier. A supporter ce quotidien et je me demande comment ça va finir et si ça va finir. J’aimerai avoir quelqu’un, un ami juste un à qui parler un peu. Mais comme je ne suis pas tout à fait assez cinglée, je ne peux pas encore m’en inventer un. Me tirer. Me tirer le yi king.


Revoilà la voisine avec des seaux. Elle a souvent des seaux à la main et en balance le contenu dans la rivière. Je me demande ce que c’est. On dirait de l’eau… Peut être ont-ils des fuites. Ou alors elle lave tout le temps par terre…


Mais dieu que cette maison est triste… Comme on ne dit rien, les enfants occupent tout l’espace sonore alors j’ai souvent mal à la tête. J’ai de plus en plus de mal à moi. Je m’ennuie, c’est terrible ce que je peux m’ennuyer. Rien que toi. Dans un projet d’écriture. C’est une voie possible pour sortir de ma lente dématérialisation. Et toi tu es très loin. Il faudrait que je me plonge. Je ne fais pas exprès, je décroche, je divague et soudain je me retrouve en face de quelqu’un qui vient de tourner la tête pour parler avec un autre.

Aujourd’hui je suis sensée commencer un vague programme de remise en forme. Rien que d’y penser j’ai envie de me barrer en courant. La discipline m’apportera quelques satisfactions et me gardera de tomber dans le trou. Hein ? Pas vrai ? S’y tenir. C’est tout sauf mièvre. Je suis obligée d’y aller petits bouts par petits bouts parce que ça me tord l’estomac. Le sujet de l’esclave consentante, l’image du bourreau. Sans visage. Choisi pour décrire ces scènes de tortures physiques et morales. Les rituels, le silence, l’abandon total.
Une sorte de carmélite privée à usage multiple.


MERDE.

EMD

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