samedi 19 février 2011

SUD - Le Vide 2 - Empty voices, empty rooms.

Je passe mes doigts sur tes tatouages et ça peut sembler idiot mais je les sens après. Comme je les sens après les avoir enroulés tendus remontés descendus autour de ton sexe. Et bêtement je souris à l’absence de tâches vertes.

J’aurais voulu avoir le temps de connaître tous les desseins de tes dessins. Pourquoi celui-là, pourquoi celui-ci, pourquoi ce jour-là et pour qui ? On écrit toujours à quelqu’un. Est-ce que ça fait mal ? En mémoire de quoi ? De qui ?

Je mets mon nez dans le sous-bois des aisselles et dans celui de l’aine qui sent le ventre de matou, le duvet humide au déhanchement des pattes, le bébé animal. Je me demande si les petits chats ont aussi des dents de lait. Sûrement. C’est à ce moment-là que la souris passe.
Tu n’as pas su trouver les neuf pièces d’or que j’avais glissées sous ton oreiller.

Mes doigts vernis de toi, je les frotte deux par deux puis chasse d’un revers de main les minuscules paillettes que ça fait tomber sur le drap.
Je te parle, tu ne dis rien.
Je me demande si tu ne préfèrerais pas que je me taise pour pouvoir t’endormir. Mais je ne pose pas la question.

Est-ce que tu m’écoutes ?

J’aimerais la caresse de ta main dans mes cheveux mais je n’ose rien exiger.
Je fais semblant d’être au repos et je m’en veux de n’avoir pas la force de me lever et de te rouer de coups. Ou de te laisser là, sur une cinglante réplique qui ne me vient pas, les yeux au plafond, j’imagine. Eviter demain qui sera mat et blanc, saturé de cris absents qui me laisseront - je le sais déjà - assise et stupide avec le goût jaune et vert de la bile.

Mon champ de vision survole trois grains de beauté flous (je suis trop près) sur la pente descendante qui rejoint le drap avant de buter sur le mur d’en face. J’essaie de rendre aussi palpable que possible la mollesse de mon corps qui pourtant prend feu. De l’accorder à la circonstance. Mais je suis toute tendue de questions et mon cœur cogne grosse caisse sous la chemise.
Pas de stase.


Je nous voudrais unis par un fil électrique, le courant alternatif clac clac encore. Je me tais. Intranquille. Toi, inconscient de l’abnégation dont je fais preuve pour me dissimuler bien consciencieusement que j’ai moi-même créé ce que j’adule encore. C’est une maladie à ce point-là. Je le sais parfaitement. Et comme dans le cliché, je me refuse à guérir. Je n’ai peur de rien tu vois.






J’ai terriblement envie d’allumer une cigarette. Mais je ne bouge pas.

Tu ne dis rien du tout.
Je te voudrais endormi. Mort peut être. Et j’ai ce pressentiment qu’il ne faut surtout pas dire que je t’aime à cause du sourire cynique qui ferait une mauvaise couronne à mes cheveux. (J’ai des yeux derrière la tête et je sais tout de toi).

Je reste immobile. Le corps le plus léger possible. Une jambe entre tes jambes, ma tête sur ton sein plat. L’immobilité de tes bras alignée à ton corps gigantesque, je ne l’aurais pas remarquée sans le contraste qu’elle fait avec le clignement sporadique (nerveux ?) de tes paupières.
Tu ne dors pas. Tu ne me tiens pas (dans tes bras). Tu es là plombant comme une absence qui ne fait même pas semblant d’être loin. Ça dure comme un vieux siècle qui rechigne à laisser la place. Et je finis par sombrer sur le coup de chance d’une seconde au relent d’hallali.
Et je m’endors, absolument en train de te haïr, mon amour.



Photo Copyright Nan Goldin.

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